Istanbul : des milliers de manifestants contre la guerre avec la Syrie
Résistance
L'artillerie turque vient à peine de marteler les positions de l'armée syrienne proches de la frontière que les forces politiques et sociales opposées à l'aventurisme militaire de M. Erdogan sont descendues avant-hier (4 octobre, NDLR) dans les rues d'Istanbul pour manifester leur opposition à la guerre à la Syrie. Le rassemblement avait commencé par agréger le matin des dizaines de personnes près du Parlement à Ankara. Un rassemblement qui a grossi à vue d’œil.
Environ cinq mille personnes – des militants kurdes, les partis de la gauche radicale et des groupes pacifistes turcs - se sont rassemblés sur la place Taksim, le centre traditionnel de la vie politique de la ville, pour protester contre l'autorisation donnée par le Parlement au gouvernement d'Erdogan de mener des opérations militaires au-delà de la frontière pour une année entière. À Istanbul, les manifestants ont défié le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan et son parti AKP, qui, avec les nationalistes de droite du MHP, a voté en faveur de la motion au Parlement. Un des slogans le plus couramment entendu a été : « AKP, pas touche à la Syrie ! ».
Il ressort de tous les sondages effectués ces derniers mois
et de nouveau juste après le début des bombardements turcs en Syrie qu’une nette majorité de la population en Turquie s'oppose à une participation militaire dans la crise syrienne. Les plus majoritairement hostiles à la guerre sont naturellement les communautés kurdes et alaouites, qui comptent des millions de membres en Syrie, mais aussi la plupart des mouvements progressistes ou, plus simplement, des laïcs qui ne voient pas d’un bon œil le soutien à l’armée syrienne libre et à ses différentes factions connues pour leur collusion avec l’islam fondamentaliste.
« Les Turcs et la Syrie ne sont pas des ennemis, mais le gouvernement de l'AKP essaie d’amener notre pays à une guerre contre la Syrie, afin de servir les intérêts des États-Unis », a déclaré un manifestant aux média. Mais la lecture que peut en faire une partie de la gauche turque est complémentaire. Ce n'est un secret pour personne qu’après avoir exercé un rôle clé dans l'éviction de Kadhafi en Libye et dans le soutien au « printemps arabe » en Tunisie et en Égypte, la bourgeoisie islamo-nationaliste turque aspire à exercer un rôle hégémonique à Damas. Enfin, le contrôle de la Syrie par la Turquie infligerait un coup mortel à la guérilla kurde qui, durant les derniers mois, est devenue plus agressive et met régulièrement à mal les troupes d’Ankara.
Certains groupes politiques d'opposition ont tenté, malgré les affrontements de la matinée avec la police, de venir de nouveau crier leur opposition à la guerre. Ils ont alors dû faire face à la police anti-émeute, qui utilisa tous les moyens répressifs à sa disposition : matraques, gaz lacrymogènes et canons à eau. Certains manifestants ont été blessés.
Outre Ankara, des manifestations pacifistes ont également eu lieu à Izmir, Mersin, Eskişehir et d'autres villes turques.
Capitaine Martin
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