Qui veut la peau du non-alignement algérien ?
Les mauvaises nouvelles s'accumulent pour le gouvernement algérien ces derniers temps.
Non seulement le pays est désormais entouré de gouvernements islamistes au Maroc et en Tunisie (la Tunisie qui d'ailleurs se rapproche d'Israël en ce moment), mais l'armée algérienne a intercepté dans la nuit du 11 au 12 décembre deux 4×4 libyens chargés d’armes (des armes semi-automatiques, lance-roquette et des roquettes) sur son territoire au nord de la région de Djanet. Ces mouvements clandestins d'armes en provenance de Libye dont la destination est inconnue sont de mauvais augure pour l'avenir de la région.
Une autre menace semble se dessiner du côté du Qatar (qui a été dans les affaires libyenne et syrienne un des bras armés des Occidentaux).
Selon le site électronique libanais «Libnanews», «l’opposant» algérien Saad Djebbar est régulièrement reçu par l’émir du Qatar qui l’a désigné comme son avocat personnel. Au même moment, Oussama Madani, un des fils de Abassi Madani (l'ancien président du Front islamique du Salut emprisonne après 1991), ouvre une chaine de télévision, qui, selon le journal Le Temps, serait financée par la Qatar (où il vit, et maintient par ailleurs des liens avec le CNT libyen) et c'est de Doha la capitale de l'émirat que le numéro 2 du FIS a fait savoir qu’il envisage de poursuivre l’Algérie devant des instances judiciaires internationales pour ne pas avoir accepté le retour, sur la scène politique nationale, de son parti politique.
Lors du vote de la Ligue arabe suspendant la Syrie de cette organisation, le chef de la diplomatie qatarie Cheikh Hamad bin Jassem bin Jabr Al Thani aurait lancé à son homologue algérien «ne défendez pas trop la Syrie car quand votre tour arrivera, vous aurez certainement besoin de nous». Doha serait donc en train de rassembler les forces islamistes algériennes contre le régime militaire.
Dans les colonnes du journal Elkhabar le 13 décembre (en arabe ici), le syndicaliste trotskiste américain Alan Benjamin met en cause Washington (il est bizarrement présenté comme le "dirigeant de l’union syndicale des travailleurs" - algérienne ? - aux Etats-Unis mais sa fonction syndicale aux Etats-Unis est en réalité "membre du San Francisco Labor Council", et à ce titre il s'est aussi impliqué contre la guerre d'Irak). A l'issue de la conférence internationale sur les ingérences et les guerres d’occupation, tenue à Alger,il affirme que son pays aurait déjà anticipé la transition démocratique en Algérie, qu'il existerait déjà un "CNT algérien dans les tiroirs de la Maison blanche" et que des personnalités algériennes ont été déjà contactées pour le former. Hélas des noms jusqu'ici n'ont pas été mentionnés. M. Benjamin ne semble pas avoir publié d'éléments concrets sur ce thème, ni en langue en anglaise ni en français.
Louisa Hanoune, secrétaire générale du parti des travailleurs algérien (PT) et résistante historique de la guerre de décolonisation, a de son côté condamné, les manœuvres extérieures auxquelles doit faire face l’Algérie, en citant « la révolution du 17 septembre », appel lancé sur Facebook (et qui serait selon le quotidien Ennahar l'œuvre de l'écrivain Bernard-Henri Lévy qui est né en Algérie, mais aucune preuve n'est apportée sur ce point - le ministre de l'intérieur M. Ould Kablia dans le même journal met en cause aussi Israël du fait que le 17 septembre est l'anniversaire des accords de Camp David, mais là encore les preuves font défaut). Dans son rapport d'ouverture, en marge de la session ordinaire du bureau politique, organisée au siège de son parti, elle a estimé que cet appel est lancé par une source inconnue qui veut déstabiliser l'union du pays. Elle a accusé, dans ce cadre, les lobbies qui veulent servir les intérêts étrangers et qui œuvrent pour diviser le pays.
Selon Samira Azzegag du journal le Temps, évoquant la situation actuelle en Libye, Mme Hanoune a précisé que ce qui se passe dans le pays voisin n'est pas une révolution, mais une anarchie totale, dictée par une force étrangère et dont l'avenir est incertain. Cette incertitude inquiète l'oratrice qui n'a pas manqué de mettre en garde contre les répercussions «cruciales» de cette crise et de «l'intervention militaire de l'Otan». Et d'enchainer : «L'Algérie, en tant que pays, ne doit pas reconnaitre la légitimité du CNT. Abondant dans ce sens, la première dame du PT est convaincue que la priorité du CNT est de préserver l'intérêt de la France». La reconnaissance de ce conseil n'est autre, aux yeux de Mme Hanoune, qu'une «légitimation de la guerre et de la présence des forces d'occupation étrangères».
Les infiltrations d'armes, et les rumeurs d'ingérence extérieure ne sont en tout cas pas faites pour arranger les relations entre la Libye et l'Algérie, d'autant que les deux pays sont en rivalité sur la question pétrolière : la Libye ayant annoncé qu'elle augmentera sa production pourrait nuire au quota de production au sein de l'OPEP de l'Algérie qui est sa concurrente directe, dans un contexte où tous les producteurs sont enclins à produire plus, et où la consommation occidentale pourrait décroitre avec la crise, tirant ainsi les prix vers le bas. Pour lever un sujet de contentieux avec les Libyens et les Occidentaux, les autorités algériennes vont en tout cas cesser d'héberger sur leur territoire Aïcha Kadhafi, qui pourrait prendre la tête d'une chaine de télévision au Venezuela.
Djibril Cissoko
http://atlasalternatif.over-blog.com
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