BHL expulsé de Tunisie pour “trouble à l’ordre public”

BHL expulsé de Tunisie pour “trouble à l’ordre public”
Mondialisation.ca

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Arrivé à Tunis vendredi soir, le philosophe français, Bernard Henri Lévy, devait assister, le dimanche 2 novembre à Hammamet à une conférence sur la situation en Libye, un sujet qui lui tient à cœur depuis qu’il a milité en faveur de l’intervention franco-qatarie sous le règne de Nicolas Sarkozy. La réunion a été organisée par le représentant d’Ennhadha aux Etats Unis, Radwan Masmoudi, président de l’association « Islam et Démocratie ». Mais hélas pour BHL, sa diplomatie parallèle n’est pas du goût du gouvernement tunisien qui l’a prié de reprendre l’avion vers Paris pour « trouble à l’ordre public ». .

Nous voici au cœur des réseaux entre une partie de l’administration américaine, les Frères Musulmans en Tunisie et en Libye et des hommes d’affaires véreux qui arrosent tout ce petit monde. BHL devait assister, le dimanche 2 novembre, à une conférence sur la Libye organisée à Hammamet, la plus grande ville touristique de Tunisie,  par un certain Masmoudi, le représentant du mouvement ides islamistes tunisiens, Ennhadha, aux Etats Unis et le président de l’association Islam et Démocratie.

La réunion était parrainée par un homme d’affaire douteux, Chafik Jarraya, surnommé « la Banane », en raison du monopole d’import-export qu’il a obtenu sur ce fruit. Cet affairiste à multiples bandes est devenu un entrepreneur prospère grâce aux contrats qu’il obtint en Libye à l’époque de Kadhafi et avec l’appui du clan Trabelsi, du nom de l’épouse de Ben Ali, qui regroupait les moins recommandables des familles alliées à l’ancien régime. Et voici « la Banane » qui, depuis quatre ans, a lancé à Tunis deux journaux en arabe pour soutenir les islamistes d’Ennhadha et qui est connu pour financer les Frères Musulmans et quelques autres candidats aux présidentielles en Tunisie.

En eaux troubles

Lors de la réunion d’Hammamet du 2 novembre, BHL devait notamment rencontrer Adelhakim Belhadj, le chef des Frères Musulmans libyens et l’homme du Qatar, dont le plus fidèle allié à Tunis s’appelle…Chafik Jerraya. Que du beau monde! Le plus surprenant
est que Belhadj est interdit de séjour officiellement en Tunisie. Le ministère tunisien de l’Intérieur refuse de lui accorder le moindre visa et s’il rentre tout de même en territoire tunisien, notamment pour se faire soigner, c’est avec l’appui des dirigeants d’Ennahdha…mais illégalement. Comment Belhadj peut-il dans ces circonstances assister à une conférence officielle à Hammamet? Y rencontrer des personnalités telles que BHL? Et bénéficier du soutien des dirigeants d’Ennahdha organisateurs de cette réunion?
Ce n’est pas la première fois que BHL rencontre monsieur Belhadj. Lors du voyage éclair que le philosophe et « sauveur de la Libye »avait effectué à Tripoli le 22 mai 2014 et dont la presse n’avait pas parlé, le niveau de sécurité autour de sa personne avait été assuré par les milices islamistes qui règnent sur la ville sous le commandement de Belhadj. Les deux hommes s’étaient longuement entretenu.

Du neuf avec de l’ancien

Sans mandat officiel, sauf le sauf conduit que constitue son amitié avec Laurent Fabius, BHL avait joué, lors de ce discret déplacement, aux faiseurs de roi, en proposant la nomination d’un gouvernement idéal. Le Premier ministre, selon lui, devrait redevenir l’ancien chef de gouvernement Zeidan. Le ministre de l’intérieur qui aurait ses faveurs est Abdelhakim Belhadj, l’homme du Qatar à Tripoli qui règne sur quelques centaines de miliciens islamistes et surveille les principaux lieux de détention de la capitale libyenne. Rien de tout cela n’a évidemment été suivi d’effets.

Personnalité sans mandat officiel ni rang institutionnel, Belhadj est aujourd’hui l’un des personnages les plus puissants du pays. Autrefois honni et traqué, il est aujourd’hui incontournable. Après avoir été financé et soutenu par le Qatar à la veille de la révolution, il multiplie depuis les déplacements à l’étranger pour consolider sa position de force à l’intérieur du pays et laisse entendre qu’il s’est éloigné de Doha, qui est soupçonné de financer l’Etat islamique.
Très proche du président turc Recep Tayyip Erdogan et des islamistes de Tunisie, notamment de Ghannouchi, le chef d’Ennahdha, l’ami Belhadj a surtout ses entrées à Washington. Mais ce fin politique sait ne pas être prisonnier de ses alliances. Plus récemment, le chef des islamistes libyens a même été reçu par des hauts responsables algériens et par Jacob Zuma, le président d’Afrique du Sud. Alger et Pretoria comptent sur lui pour contrôler, voire réprimer, les jihadistes libyens violents et rétablir un semblant d’ordre dans le chaos. Retournement de situation étonnant quand on connait le curriculum d’Abdelhakim Belhad. A seulement 22 ans, Abdelhakim s’expatriait dans le Peshawar, au nord du Pakistan, où il suivait l’entraînement militaire et spirituel qu’organisent Abdallah Youssef Azzam et Oussama Ben Laden, les deux créateurs d’Al-Qaida.

BHL dégage!

La présence de BHL en Tunisie aura été d’autant plus surprenante qu’il ne s’est jamais intéressé à ce pays ni dans ses écrits ni dans ses chroniques. Sous Ben Ali, BHL n’a jamais dénoncé les dérives du régime, pas plus qu’il ne s’est penché depuis sur la formidable transition démocratique tunisienne. Autant son soutien aux généraux algériens, à qui il a consacré deux longs articles dans « le Monde » bourrés d’erreurs, est connue, autant son indifférence à la Tunisie est totale. Aussitôt connue son arrivée à Tunis, de nombreux tunisiens se sont massés à l’aéroport avec un seul mot d’ordre: « Dégage ». En revanche, ce tigre de papier et va-t-en guerre a pris fait et cause pour la guerre en Libye. Il aura été le propagandiste zélé de l’intervention franco-anglaise, soutenue par le Qatar. Après le départ de Kadhafi, il ne s’est illustré que par une volonté suspecte de rapprocher le CNT libyen de l’époque, qui luttait contre Kadhafi, de la diplomatie israélienne.

Cet automne, le bide de sa dernière pièce de théâtre à « l’Atelier » l’avait rendu amer et silencieux. L’expulsion de Tunisie n’est pas exactement le « come back » dont il rêvait. Philosophe enseigné dans aucune université, journaliste mêlant le vrai du faux, cinéaste de raccroc, écrivain sans œuvre littéraire, guerrier sans aucun fait d’armes, BHL est juste au bout de ses impostures. La Tunisie ne s’y est pas trompée qui sait ce qu’en matière sécuritaire, l’incendie allumé en Libye par BHL, Sarkozy et le Qatar comporte aujourd’hui encore des risques majeurs pour l’ensemble de la région
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