Qatar : le Corbeau voulant imiter l’Aigle!

IRIB

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Il est clair d’emblée que le rôle que joue le Qatar, sur la scène des évènements régionaux, depuis l’accord de Doha, en 2008, vise à imposer ce petit émirat, dont la population ne dépasse pas un million et quelques centaines de mille de sujets, comme joueur principal aux conflits du Moyen-Orient.

De façon similaire, depuis sa précipitation théâtrale sur la scène des évènements du "Printemps arabe", l’émir du Qatar, Cheikh Hamad, insiste à se présenter en costume de despote éclairé. Pour en faire, il s’habille en Frédéric II de Prusse, dit Frédéric le Grand, et fréquente les voltaires de l’impérialisme français, tel que Bernard-Henri Lévy, et ceux de l’obscurantisme arabe, tel que Youssef al-Qardaoui. Par contre, il est vrai que Hegel fait, quelque part, cette remarque que «tous les grands évènements et personnages historiques se répètent, pour ainsi dire, deux fois. Il a oublié d'ajouter : la première fois, comme tragédie, la seconde fois, comme farce».

De surcroit, le Cheikh Hamad – on l’appelle, aussi, émir - s’est entretenu, le 4 janvier, avec le secrétaire général de l’ONU, monsieur Ban Ki-Moon, de la possibilité d’associer l’ONU à la mission de la Ligue arabe, en Syrie, afin que celle-ci profite de «l’expérience» de l’organisation internationale, en matière de mission de paix et d’interposition. Cette manœuvre, de la part de l’émir, vise à atteindre deux objectifs : premièrement, faciliter et légitimer une intervention de l’OTAN, dans la crise syrienne – il n’est plus secret que, parmi les récentes «expériences» de l’ONU, figure le feu vert à l’OTAN, pour la destruction de la Lybie – ; deuxièmement, contrecarrer le pouvoir de la Ligue arabe et réduire son rôle, comme organisation représentant les intérêts du monde arabe, pour qu’elle soit une sorte de Loya Jirga, rassemblant, précisément, les émirs et sultans des familles royales du golfe Persique. Il en va de même que l’émirat du Qatar, qui possède une armée de mille cinq cents mercenaires, mais qui abrite, par contre, la plus grande base militaire américaine, dans la région, ambitionne de jouer un rôle, au niveau international, aussi énorme que l’énormité de la présence des troupes étrangères, sur son territoire. Ainsi, aux premières lueurs du "Printemps arabe", le Qatar, qui s’est transformé en un outil médiatique, aux mains des puissances impérialistes, dans le monde arabe, s’est précipité, sur la scène des évènements. Il faut souligner le rôle que joue, en ce sens, la chaine Al-Jazzera, dont l’objectif est de fausser les données réelles de la guerre impérialiste contre la Syrie, et cela, en promouvant un discours de haine et de ressentiment religieux contre les groupes minoritaires au monde arabe. Aussi le Qatar, en s’alignant sur des positions, qui suggèrent, carrément, l’intervention étrangère, en Syrie, est allé loin, dans la question des sanctions contre la Syrie, qui ont laissé des effets négatifs et directs, sur le niveau de vie, l’alimentation et les médicaments du peuple syrien. On en peut que partager le même avis de l'analyste politique russe, Viatcheslav Matuzov, qui a souligné que le Qatar joue un rôle négatif, au sein de la Ligue arabe, ajoutant que «les États-Unis veulent la chute et la destruction de la Syrie, en tant qu'État arabe indépendant (…) L'Occident a une seule demande de la part de la mission des observateurs arabes, à savoir, la prise d'une position, en solidarité avec l'opposition extrémiste, sans aucun souci de chercher après les faits réels sur le terrain», a estimé l'analyste russe, dans une interview à la chaine «Russia Today».

Il convient de mentionner que les ingérences hostiles du Qatar, dans les affaires internes de la Syrie, se font, au moment où deux puissances se confrontent, dans une sorte de guerre froide, dans la région du golfe Persique : celle du Pygargue, à tête blanche, étatsunien et celle du Derafsh Kaviani iranien. La présence de la première puissance est en déclin, dans la région, surtout, après le retrait des légions de l’Empire de l’Irak ; celle de la deuxième puissance est en croissance. Entre ces deux grandes puissances belligérantes – l’Iran et l’Empire étatsunien – les ambitions «impériales» du Qatar évoquent en nous la fable de La Fontaine, Le Corbeau voulant imiter l’Aigle. Pendant toutes les périodes précédant le "Printemps arabe", l’Égypte jouait un rôle central, au sein de la Ligue, qui lui permettait de diriger le monde arabe, surtout, à l’époque du Président Nasser (1956 – 1970) et la montée de l’idéologie nassérienne.

Dès sa naissance, en 1945, la Ligue arabe était toujours divisée en deux camps aux visées politiques opposés. D’abord, dans les années quarante et cinquante, l’entente égypto-saoudienne, favorable aux projets d’indépendance, s’opposait à l'axe hachémite jordano-irakien, plus enclin à une coopération avec la puissance britannique, encore, maitresse de nombreux protectorats et mandats (Soudan, Palestine, Émirats, etc.). Par la suite, dans le contexte d’anti-colonialisme et de la Guerre froide, la division prit une nouvelle démarcation entre États socialistes, proches de l'URSS (Libye, Syrie, Algérie, Égypte de Nasser, l’Irak, le Yémen du Nord) et États proches des États-Unis (les émirats et sultanats arabes du golfe Persique). Enfin, après la chute de l’Union soviétique, la Ligue arabe se trouvait divisée, encore, en deux camps : d’un côté, les pays résistants aux projets américains de domination (surtout, la Syrie et le Liban) ; de l’autre côté, les pays dociles à l’Empire (toujours, les émirats et sultanats arabes du golfe Persique, l’Égypte de Moubarak).

Suite à la chute du dernier pharaon, Moubarak, en 2011, l’Égypte se trouve occupée par ses problèmes internes, ce qui l’empêche de continuer à jouer un rôle principal, dans le monde arabe, même si le secrétaire général de la Ligue continue à faire privilège de l’Égypte. Il n’est plus secret que l’absence «transitoire» de l’Égypte, comme leader du monde arabe, a entrainé une diminution du rôle que joue la Ligue. Autre que l’Égypte, aucun pays n’est en mesure de diriger le monde arabe. L’Égypte reste le seul pays «habile» à jouer ce rôle, vu son poids démographique, économique et culturel. Sur un autre plan, l’Arabie saoudite n’est plus dans une situation lui permettant de remplir ce vide laissé par l’enfermement de l’Égypte, sur ses propres crises et problèmes internes, et cela vu la fragilité et l’instabilité intérieure et les tremblements politiques aux portes du Royaume – la révolution, a Bahreïn, et la guerre civile, au Yémen. Simultanément, les pays du Maghreb ne sont pas, non plus, en mesure de diriger le monde arabe, vu, premièrement, leur position géographique, au bout du monde arabe, et deuxièmement, la nature démographique de ces pays, qui ne constituent pas vraiment des agglomérations de masses, comme l’Égypte et le Levant, mais, plutôt, des centres urbains dispersés, au long de la côte méditerranéenne de l’Afrique du Nord. De même, la Tunisie reste, au lendemain de sa révolution "Jasmin", instable, du point de vue politique ; et la Lybie se trouve ruinée, par la grâce de la «mission humanitaire» de l’OTAN.

Donc, le retrait temporaire de l’Égypte de la scène des évènements a créé un vacuum, aux niveaux politique et diplomatique. Ajoutant à cela, le retrait des légions de l’Empire, de l’Irak, qui a ouvert les portes, devant la puissance iranienne ascendante. Pour faire «barrage» à l’expansion iranienne, seul, le Qatar, semble capable de jouer ce rôle, aux niveaux politique et diplomatique, en tant que concessionnaire de l’Empire et négociant – plutôt que négociateur – ; pour la simple raison que, du point de vue militaire, le Qatar n’est, en réalité, qu’une base militaire américaine, dans la région.

Pour contrecarrer le rôle de la Ligue arabe, l’ingérence hostile du Qatar, dans la crise syrienne, et son engagement complet à la conjuration impérialiste visent, en premier lieu, à créer des divisions entre ses membres, basées sur des sensibilités religieuses – sunnites vs. chiites – et ethniques – Arabes vs. Perses – et deuxièmement, à transformer la Ligue, en une sorte de Loya Jirga, rassemblant les émirats et sultanats arabes du golfe Persique, dont les monarchies se justifient par une idéologie wahhabite, la même que celle des Taliban. Plus tard, ce nouveau bloc wahhabite, qui comprend les émirats et sultanats arabes du golfe Persique, les Taliban de l’Afghanistan et les "Frères musulmans" de l’Égypte et de la Syrie – bénéficiant de l’énorme support des puissances impérialistes – tenterait de démembrer l’Arc chiite qui s’étend de l’Iran jusqu’au Liban, tout en passant par l’Irak et la Syrie ; et cela, en renversant le régime syrien, en premier lieu, ensuite, en isolant le gouvernement de Maliki, en Irak, en second lieu. Par conséquent, le Hezbollah, au Liban, se trouverait coupé, totalement, de son arrière-front, l’Iran ; ce qui faciliterait, à une étape plus avancée, à envahir l’Iran. En un mot, l’ouverture d’un bureau de Taliban, au Qatar, met, officiellement, fin à la guerre étatsunienne contre le terrorisme ; et les ennemis d’hier deviennent les amis d’aujourd’hui. Ce qui revient à dire que les dernières attaques terroristes, au cœur de la capitale syrienne, expriment l’application concrète de ces nouvelles Liaisons dangereuses qui sont émergées, récemment, entre le vrai Patron – l’Empire étatsunien – représenté par son concessionnaire arabe – le Qatar – d’un côté, et les Taliban, de l’autre côté – derrière eux Al-Qaïda, évidemment....

Fida Dakroub

http://www.alterinfo.net

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